PARIS AUDACIEUX
C’est un scandale !
Le tout-Paris est indigné. Dans son journal, le magistrat Pierre de l’Estoile dénonce l’invraisemblable débauche du précédent carnaval, marqué par toutes sortes de débordements.
En 1589, les autorités ecclésiales décident de purifier la morale carnavalesque…

Ce ne sont pas moins de six cents écoliers, certains seulement âgés de dix ans, qui déambulent dans les rues de Paris en ce Mardi gras 14 février 1589.
Pieds nus ils avancent avec pour seul vêtement une chemise blanche.
Les cierges blancs qu’ils tiennent à la main ne suffisent pas à adoucir la morsure du froid de février.
Leurs chants résonnent dans les rues de la capitale et l’ambiance est remplie de dévotion.
Toute la journée, ils vont et viennent dans la ville, s’arrêtant dans chaque église pour prier.
Après le carnaval, le souvenir de si belles processions laisse dans les mémoires un sentiment « attendri ».
Tant et si bien que dans les semaines qui suivent, au beau milieu de la nuit, on envoie régulièrement chercher un prêtre ou un curé pour qu’il prenne la tête d’un nouveau cortège.
Paris est gagnée par une fièvre processionnelle sans précédent !

Néanmoins, il se trouve quelques rabat-joie, hommes d’Église et laïques, pour critiquer ouvertement ces pratiques.
Tiré de son lit en pleine nuit, le curé de Saint Eustache est même traité « d’hérétique » et de « politique » alors qu’il ose refuser de mener une nouvelle procession !


Il faut dire que ces débordements de ferveur religieuse entraînent des conséquences pour le moins fâcheuses.
Et au bout de neuf mois, les effets de ces rendez-vous nocturnes ne tardent pas à se faire sentir.
Ici, une fleuriste de la porte Montmartre se retrouve mère, la jeune femme dénonce les œuvres d’un homme d’Eglise.
Et Pierre de l’Estoile de s’élever contre un curé lorsqu’il déclare : « qu’en ces processions, les pieds blancs et douillets des femmes estoient forts agréables à dieu » !
** Extraits – D’après « la folie carnaval » de Sarah Belabes – Timée-Editions –