MAGNAN

Magnan, pour beaucoup de Niçois, c’est un carrefour, une caserne de pompiers.
Pourtant, il existe un autre Magnan.

Il y a d’abord l’enclave du « beau Magnan », quelques rues et une église qui ont échappé à l’urbanisme moderne.
Une époque où à la place de la caserne, se dressait un vélodrome où, le Dimanche après-midi, on allait au « Magnan », le cinéma du coin.
Le Magnan (le cours d’eau) était encore à découvert, les enfants jouaient sur les rives. Il y avait les pêcheurs qui, tôt le matin en revenant de la pêche, s’installaient au « Magnan » une brasserie qui existe toujours.
Là, ils mangeaient un morceau de « porchetta », buvaient un verre de rosé et commentaient l’importance des prises.
Aujourd’hui, Magnan à entièrement changé de visage.
Magnan est devenu le centre nerveux de l’Ouest de la ville, avec le flot de voitures qui descendent de la Madeleine.



L’histoire de cette partie de l’Ouest de Nice s’écrit au féminin.
Ici, depuis l’origine, des femmes ont marqué leur empreinte.

MISS PENELOPE
La première s’appelait Pénélope Rivers, elle était anglaise, fille de banquier, mariée et divorcée d’un pair d’Angleterre, lord Georges Pitt.
La belle Pénélope acheta en 1787 un splendide terrain situé dans le quartier dit à l’époque du Petit Saint-Laurent (ce qui correspond aujourd’hui au quartier de Magnan et une partie de Grosso).
Sur ce terrain poussaient orangers et citronniers, toute la luxuriance méditerranéenne.
Pénélope fit édifier là une villa, la plus belle de Nice, elle y recevait la colonie anglaise, on y dansait, on y jouait, on y faisait la conversation.

En 1792, la Révolution frappait.
La demeure de l’Anglaise fut nationalisée avant d’être bradée à un certain Sébastien Grandis pour une bouchée de pain.
La villa fut livrée aux herbes sauvages.

PAULINE
Vint l’Empire et vint surtout Pauline, la sœur de Napoléon, la princesse Borghese.
La princesse opta pour cette magnifique demeure lors de ses deux séjours niçois.
La sœur de l’Empereur, logeant à la villa Grandis, ce fut un évènement dans l’histoire locale.
Nous sommes en 1807, l’Empire est à son apogée.
Pour les Niçois, la présence de la princesse, c’est un peu de la gloire du vainqueur d’Austerlitz et de Iéna.
Des Niçois, quelque peu étonnés d’ailleurs par le comportement de cette princesse fort belle, que l’on croirait échappée d’un vase grec selon la formule de l’historien Frédéric Masson.

Pauline reviendra à Nice, toujours villa Grandis, mais les temps ont changé, nous sommes dans la funeste année 1814, l’Empire s’écroule, les armées coalisées de l’Autriche, de la Prusse et de la Russie pénètrent sur le territoire français.
Pauline quitta Nice pour Gréoul, première étape de la route vers l’exil.
Mais le destin de cette demeure romantique ne devait pas en rester là, elle fut vendue au banquier Carlone avant d’être rachetée par Cécile Furtado, une Parisienne, épouse du banquier Charles Heine, neveux du poète allemand Henri Heine.
En 1895, elle fit don de sa villa au bord de mer au ministre de la Guerre qui la transforma en résidence de vacances pour les officiers. Grâce à cette donation, la villa de Pénélope subsiste encore.

MOUSSIA
Avec le second Empire et l’annexion du Comté à la France, Nice va vivre ses plus belles heures, la toute nouvelle Promenade se peuple de villas, d’hôtels, la vie mondaine s’y concentre.
Dans l’une d’elles, appelée « Acquaviva » est venue s’installer en 1870, l’une de ces familles russes, bohème et désargentée qui font immédiatement penser à Tchekov : les Bashkirtseff.
Marie, la jeune fille de la maison, a tout juste treize ans.
Elle est fine, racée, intelligente, elle danse, elle chante, elle peint et surtout elle écrit.
Elle écrit le jour et la nuit, elle tient un journal dont les premières lignes sont écrites en 1873, à la villa « Acquaviva ».
Marie écrit en français, elle a reçu l’éducation de l’époque qui faisait du français, où que l’on soit né en Europe à condition d’appartenir à un milieu social élevé, sa langue naturelle.

Marie se mêle à la vie mondaine.
Elle se veut de tous les bals, de toutes les fêtes, elle va au théâtre, à l’opéra.
La famille Bashkirtseff déménage villa Baquis, dans le quartier de la Buffa.
Heureuse, Moussia (ses amis l’appelaient ainsi), travaille.
Le bonheur, si ce n’étaient les premières atteintes du mal terrible qui devait l’emporter, la tuberculose.
Marie quitte Nice pour Paris, elle expose ses toiles, on commence à parler d’elle.
En 1882, Marie revient à Nice.
Elle se consacre à la peinture, elle croque l’homme de la rue et le paysan des collines.
Marie s’éteindra un soir d’Octobre 1884 à Paris. Elle avait 23 ans.

La mère de Marie restera à Nice dans le petit pavillon au fond du parc, elle y mourra seule en 1920.

Le XXème siècle était là, les dames de Magnan ne hantent plus les parages.

Sources notoires pour l’écriture de cet article : Centre du Patrimoine – Sus lu barri, Roger Isnard – Nice Quartier, Editions Mercure…

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