L’AFFAIRE DES CHAUVES-SOURIS

Depuis 1873 à Nice, il existe un Comité des Fêtes chargé de préparer les festivités du carnaval et de récompenser les plus beaux chars. Mais dès ses débuts, l’institution se trouve prise dans la tourmente politique.
Au point de faire du carnaval de Nice une véritable affaire d’Etat …

En 1873, Andriot Saëtone, le très mondain chef du bureau de bienfaisance à la préfecture, prend l’initiative de créer un Comité des Fêtes, sous le patronage de la ville de Nice, pour la formation des cavalcades.

A lui de prévoir, entre autres, le nombre de chars et de décerner des prix aux plus réussis d’entre eux.
Le succès de la fête est tel que l’idée est reprise l’année suivante. Le programme est plus ambitieux mais le clou du spectacle reste naturellement le cortège des chars.

Si les voitures sont toutes plus somptueuses et extravagantes les unes que les autres, deux d’entre elles surpassent cependant leurs concurrentes.
Le char de Catherine Ségurane, « patronne » de la ville, est une construction colossale, un véritable monument érigé en l’honneur de la femme qui sauva Nice de l’envahisseur ottoman en 1543.
Celui réalisé par Jean Cuggia, s’appelle le char des Ratapignata, des chauves-souris en langage niçois.
Et son créateur s’est surpassé.
Mettant l’accent sur le fantastique, il a reproduit les ruines d’un véritable château fort.
Au sommet des tours, d’énormes chauves-souris déploient leurs ailes imposantes au-dessus de la foule.
Lors du défilé, il n’y a aucun doute pour la population niçoise, le char des Ratapignata remporte tous les suffrages.
Pourtant, coup de théâtre ! C’est Catherine Ségurane qui remporte le prix du plus beau char.
Cette décision provoque la colère de la population niçoise.

De toutes parts, les voix s’élèvent et demandent l’annulation de ce jugement injuste. Rapidement, un comité dissident se forme et rassemble les doléances.
Il décerne au char de Cuggia le prix de « l’opinion publique ». Mais déjà l’affaire prend des proportions politiques.
Le Comité des Fêtes démissionne et le duc de Castries est porté en triomphe à sa présidence.
D’aucuns y voient pourtant une manœuvre parisienne, le duc n’étant rien de moins que le beau-frère du maréchal de Mac-Mahon, président de la République française …

** Extraits – D’après « la folie carnaval » de Sarah Belabes – Timée-Editions –

%d blogueurs aiment cette page :